Presse - "Ils lancent l'Observatoire citoyen des droits des victimes"
Pascale Egré - Le Parisien 21 mai 2021
Ils partagent l’expérience d’un drame majeur et souvent d’un engagement associatif. Pour porter une réflexion et une parole libres, et être « force de propositions », des rescapés et des proches de victimes lancent ce vendredi l’Observatoire citoyen des droits des victimes
Il y a Anne Bembaron-Merlin, dont le mari est mort dans le crash de Phuket (Thaïlande) en 2007. Et ce « combat de tous les instants », mené aux côtés de son beau-frère avocat et d’autres victimes pour qu’un procès se tienne en 2019 à Paris. « Ce sont ces douze ans d’un parcours douloureux et chaotique qui ont donné sens à mon engagement », explique-t-elle. Il y a Catherine Gouy-Lévy, dont le frère Thierry est mort dans un attentat à Ouagadougou (Burkina) en 2017. Et qui s’est « débrouillée seule » face au casse-tête de démarches lointaines. « Quand cela se passe à l’étranger, tout est plus compliqué. »
Il y a aussi des figures plus connues du grand public et des médias parce que militants de la cause des victimes à la voix forte. Comme Emmanuel Domenach, rescapé du Bataclan, longtemps investi à l’association 13onze15 Fraternité et vérité et qui a « senti le besoin de passer la main » et de « se recentrer sur (lui-même) ». Sans pour autant lâcher : « Il faut que d’autres bénéficient de nos avancées. » Ou comme Stéphane Gicquel, frappé par le tsunami de 2005 et moteur durant onze ans de la Fédération nationale des victimes d’attentats et d’accidents collectifs (FENVAC), où il a eu à suivre « une centaine d’événements » et à épauler au plus près leurs victimes.
Un « retour d’expérience » pour « faire face à un nouvel attentat »
Lui aussi a éprouvé, après un temps de recul, « un besoin de réflexion et de transmission ». Au point d’avoir fédéré Anne, Catherine, Emmanuel et cinq autres personnes touchées par un drame majeur (attentat du Thalys, catastrophe d’Allinges…) autour d’une idée : créer une instance d’analyse et d’alerte « à la parole libre et indépendante » sur la question de l’aide aux victimes.
C’est ainsi que l’Observatoire citoyen des droits des victimes est né. Une « vigie », veulent-ils, qui sera « force de propositions » - un peu à la façon d’un think-tank.
Ses neuf fondateurs ont le souci de « dépasser (leurs) situations personnelles » pour devenir acteurs. Ce qui les mobilise avant tout, c’est la crainte que les progrès accomplis ces dernières années en matière d’aide aux victimes ne soient balayés.
« Indifférence collective croissante », « atonie des pouvoirs publics », s’inquiète leur premier communiqué de presse. « Des évolutions ont eu lieu mais on voit que l’Etat ne s’intéresse plus à ces sujets-là ; il n’y a pas de volonté politique de tirer les enseignements de ces événements. Or pour faire face à un nouvel attentat de masse ou à une catastrophe, un retour d’expérience est nécessaire », avance Emmanuel Domenach. « L’Etat doit développer une culture de l’évaluation de sa propre intervention, afin de systématiser les bonnes pratiques », renchérit Stéphane Gicquel.
Un « comité stratégique » composé d’experts
Avec la mise en place d’un véritable suivi des victimes, cette problématique constitue l’un des principaux axes de réflexion de l’Observatoire, qui ne veut ni se substituer aux associations, ni jouer « les donneurs de leçon ou les redresseurs de torts » face aux institutions.
Parmi les autres thématiques clés sur lesquelles ses membres veulent se pencher figure aussi la place de la victime dans le procès pénal, à l’approche de celui des attentats du 13 novembre 2015. Ou encore l’amélioration de la qualité des procédures d’indemnisation des victimes, notamment devant le Fonds de garantie.
Lancé officiellement ce vendredi, l’Observatoire s’est en outre doté d’un « comité stratégique » de personnes « ressources » : des avocats, magistrats, universitaires, psychiatres ou historiens « susceptibles d’apporter leur expertise » parce qu’ayant eu à connaître le sujet de près. Parmi eux, le général François Daoust, ex-patron de l’Institut de recherche criminelle et du pôle judiciaire de la gendarmerie ; l’ancien président de la SNCF Guillaume Pépy ; les ex-députés et spécialistes du terrorisme Sébastien Pietrasanta et Georges Fenech.
« Autant de personnalités à même de proposer un regard pensé, serein et prospectif pour redévelopper une doctrine et une politique publique de l’aide aux victimes », résume l’ex-secrétaire d’Etat à l’aide aux victimes Juliette Méadel, qui s’est investie dans ce projet dès l’origine et préside ce comité.
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