Attentat de la rue Copernic : Diab renvoyé aux assises
Source : https://www.lefigaro.fr/actualite-france/attentat-de-la-rue-copernic-hassan-diab-renvoye-aux-assises-20210519
Par Jean Chichizola - 19 mai 2021
Plus de quarante ans après les faits, il y aura bien un procès dans l’affaire hors norme de l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic qui, le 3 octobre 1980, avait tué quatre personnes et faisait 46 blessés. Ainsi en a décidé, mercredi, la Cour de cassation.
En début d’après-midi, un communiqué précisait que la Cour «rejette le pourvoi formé par la personne mise en examen contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de Paris qui a infirmé le non-lieu prononcé par les juges d’instruction et qui a ordonné sa mise en accusation. Ainsi, le demandeur au pourvoi est définitivement renvoyé devant la cour d’assises spécialement composée de Paris pour y être jugé sous l’accusation d’assassinats, tentatives d’assassinats et destructions aggravées, en relation avec une entreprise terroriste».
Hassan Diab, le poseur de bombe présumé qui aurait agi pour un groupe terroriste palestinien, sera donc jugé par des magistrats professionnels. Dans son pourvoi, sa défense jugeait que les notes de renseignement jouaient un trop grand rôle dans cette affaire et que ses arguments n’avaient pas été assez pris en compte. Dans son arrêt, la Cour de cassation répond que «les informations émanant des services de renseignement, régulièrement versées dans une procédure judiciaire et soumises au débat contradictoire, peuvent être prises en compte» sans fonder à elles seules «une déclaration de culpabilité». Par ailleurs, l’arrêt souligne que la chambre de l’instruction «a répondu aux articulations essentielles du mémoire du mis en examen, et, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision».
Ce nouveau développement judiciaire intervient après des années de procédure. Canadien d’origine libanaise, Hassan Diab, 67 ans, est visé en 2008 par un mandat d’arrêt du juge d’instruction Marc Trévidic et interpellé à Ottawa. Il est extradé en 2014, mis en examen à Paris et placé en détention provisoire. En 2018, il bénéficie d’un surprenant non-lieu du successeur de Marc Trévidic. Le parquet fait appel mais Hassan Diab repart au Canada en proclamant que «justice était faite». C’était aller un peu vite en besogne, l’affaire étant loin d’être réglée.
Le 27 janvier 2021, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris revenait sur le non-lieu et renvoyait l’accusé aux assises. En substance, la chambre reprenait l’argument avancé depuis des années par le parquet antiterroriste, le parquet général et les parties civiles: les éléments à charge et à décharge du dossier justifient un procès public pour en débattre et décider de la culpabilité ou de l’innocence de l’accusé. Dénonçant un déni de justice, la défense déposait le pourvoi rejeté mercredi.
«Son innocence sera reconnue»
Un nouveau combat judiciaire commence. Vivant au Canada, l’accusé sera-t-il présent à son procès, qui n’est pas attendu avant de longs mois? Son avocat canadien, Don Bayne, a demandé au premier ministre canadien, Justin Trudeau, de refuser une seconde extradition. Il a ajouté: «Tout cela se passe en raison de l’intense lobbying de groupes importants et influents en France.» Tout en précisant que ce terme de lobbying visait les parties civiles qui «ont fait pression pour qu’un innocent soit jugé».
Á Paris, les défenseurs de Diab, Mes Bourdon, Cagnat et Lefebvre se disent certains que «(son) innocence sera reconnue». Avocat de l’Association française des victimes du terrorisme, M David Père souligne pour sa part que «plus que jamais les parties civiles restent déterminées et attendent avec impatience une audience qui permettra à la justice de passer». L’une des victimes, Corinne Adler, qui, adolescente, se trouvait dans la synagogue le 3 octobre 1980, s’est déclarée «soulagée et émue. Il était essentiel que cet attentat antisémite donne lieu à un procès, quelle que soit son issue pour l’accusé».